Cela fait plus de 4 ans que nous vivons ensemble, à la Maison Bleue, il est temps de faire un point d’étape sur notre mode de vie ! Quand beaucoup y voient une démarche écolo, nous vivons surtout une expérience sociale et des moments de vie extraordinaire…

Petite historique pour toi qui nous découvres 

L’idée de vivre collectivement et écologiquement prend source dans un mouvement : le WARN!. Au début de l’année 2015, deux jeunes actifs dans cette structure se demandent comment ils pourraient aller plus loin dans leur action personnelle, comment ils pourraient mutualiser leurs efforts et créer un lieu d’idéaux et de liberté collective. Le projet est lancé, les futurs-es colocs se rencontrent, la maison est trouvée (non sans peine) et c’est parti !

Crémaillère – Juin 2015

Au début, nous sommes 8 et louons 3 appartements dans un immeuble de 5 appartements. C’est l’année pionnière, celle où nous mettons des fondamentaux de vie en place et apprenons à nous connaître. Les premiers mois vont très vite ! Le compost, check, les poules aussi, les cloisons en récups sont construites pour créer des chambres, le spot des courses bio à 1min de la maison et les premiers câlins bien sûr 🙂

En octobre de cette année, nous récupérons le 4e appartement au rez-de-jardin et 3 nouvelles personnes se joignent à nous. Nous resterons 11 pendant 2 ans, jusqu’à janvier 2017 où le dernier appartement se libère. À partir de cette date, nous sommes 14 vivant dans 5 appartements pour un total de 300m2. Au poil !

Alors, comment ça fait de vivre à autant dans un espace assez restreint tout en inventant un mode de vie sobre et joyeux ? Commençons par la base, l’autogestion

 

Les collocs – Octobre 2015

L’auto gestion au quotidien

Si vous questionnez internet, vous trouvez cette définition : “la gestion par toutes et tous des affaires qui les concernent et de l’ensemble des décisions qui régissent leur vie”.
Donc pas de “chef-fe”, normal. Mais aussi pas de planning, pas de tâches à réaliser à un moment T, pas de tour d’astreinte. Nous sommes libres de réaliser ce qui doit l’être dans la maison en fonction du temps dont on dispose, de nos envies et de nos compétences.

C’est donc une forme d’anarchie* et voici comment ça fonctionne :

  • Nous nous réunissons tous les mois pour faire le point sur les affaires de la maison. Chacun-e est libre de faire remonter ce qu’il/elle souhaite. Nous parlons aussi bien des fournitures, que des activités à réaliser, des finances, etc… . À la fin de ces réunions, nous prenons des décisions collectives sur ce qui doit être fait ou non (Au passage, Le CR des réunions et les autres documents sont hébergés sur Nextcloud, un outil libre)
  • Une fois ces réunions terminées, soit certaines personnes se sont engagées à faire une tâche soit la tâche est laissée au centre pour que quelqu’un s’en empare.
  • Enfin, nous avons une botte secrète pour savoir ce qui doit être fait : un “chat” en ligne. Étant donné nos activités parisiennes, il est essentiel pour nous de rester connecté-e-s à la maison grâce à ce “chat”. Divisé par canal, il nous permet de faire avancer les sujets en dehors des réunions.

*L’anarchie désigne l’état d’un milieu social sans gouvernement, la situation d’une société où il n’existe pas de chef, pas d’autorité unique, autrement dit où chaque sujet ne peut prétendre à un pouvoir sur l’autre.

Une tablée post-réunion

La tableau des présents-es à la maison

Construction d’une chambre

Prenons l’exemple des tâches ménagères pour illustrer : la plupart du temps, chacun-e donne de son temps pour réaliser une tâche ménagère. Dans ce principe, certains-es en font clairement plus que d’autres, mais comme il y a beaucoup d’autres choses à faire que le ménage, le temps passé dans la maison peut s’équilibrer en partie. Vous l’aurez compris, la gestion de la maison ne se fait pas de manière égalitaire. Nous basons notre principe de vie sur l’équité.

L’équité comme partage

Toujours sur les internets, on trouve cela : “une juste mesure, un équilibre, qui permet de rendre acceptable une forme d’inégalité lorsque l’égalité ne serait pas acceptable.”
Dans notre cas cela donne : je passe beaucoup de temps à m’occuper du jardin, mais pas de la vaisselle. Je ne vais jamais faire les courses, mais je donne plus d’argent au pot commun. Je ne fais rien pendant 1 mois parce que je suis occupé-e, mais je m’investis à fond le mois d’après. Voici la manière dont se gère notre vie.

Y a t-il des passagers clandestins ? Non, car nous ne comptons pas ce que nous faisons et nous ne nous intéressons pas à ce que les autres ne font pas. Seul compte le ressenti de chacun-e par rapport aux tâches qu’il/elle a réalisé. Si tout le monde se sent bien avec ce qu’il/elle fait et que personne n’a le sentiment d’être dans une position de profiter au détriment des autres, c’est que tout va bien

Vous ne vous prenez jamais la tête ? Alors oui, mais non. On ne se crie pas dessus, on règle nos problèmes en réunion ou sur le chat commun. Si quelqu’un considère avoir trop fait une tâche ( arroser les plantes, passer le balais, ranger une pièce..) il/elle le dit et nous trouvons une solution pour qu’il/elle n’ait plus à le faire autant.

Et ça marche ? Sur beaucoup de points, moins sur d’autres. Tout dépend du contexte, de la tolérance de chacun-e à certains états ou activités de la maison, de notre présence, etc… Ce qui est sûr, c’est que l’on ne part pas au conflit, on essaye au mieux de traiter toutes les frustrations .

Les 2 ans de la Maison – Déclaration d’autonomie !

Ainsi, certaines personnes sont plus actives que d’autres dans la maison, c’est sûr. Mais cette activité est conjoncturelle, ce ne sont jamais les mêmes personnes toute l’année et si elle est mal vécue, on en discute. Et l’argent dans tout ça ?

La vie à prix libre

Nous fonctionnons en partie à prix libre, c’est à dire que chacun-e met ce qu’il/elle veut au pot, et en partie en répartition égalitaire. Mis bout à bout, cela ne représente pas d’immenses sommes. C’est la richesse de vivre à 14 que de ne pas dépenser beaucoup par mois : tout est divisé !

Ce que nous payons à parts égales :

  • Le loyer : 420€/personne, peu importe la taille ou la forme de la chambre. Cela comprend internet, eau et électricité.
  • Les assurances
  • Certains gros achats ou réparations

Ce que nous payons à prix libre :

  • La nourriture et les consommables
  • Les fournitures (en fonction du prix) comprenant aussi les animaux (poules et chat)
  • Les taxes d’habitations (les moins riches mettent moins globalement).

Deux outils pour nous aider à gérer:

  • La cagnotte : dans laquelle chacun-e peut déposer et prendre de l’argent. Quand vous n’êtes pas à la maison pour faire les courses, vous laissez de l’argent dedans et quand vous faites trop les courses, vous prenez cet argent. Si la cagnotte est vide, vous rappelez le groupe qu’il faut la remplir. Simple 😉
  • Ze-Coloc : un site qui permet de poser nos dépenses et auto-équilibrer les comptes sans nous obliger à se faire des virements tout le temps.

On a tenté l’autonomie alimentaire, en vain 🙂

Voilà pour l’argent. Croyez-le ou non, ce n’est pas la partie la plus délicate à gérer dans notre groupe ! Nous en avons longuement discuté évidemment, et le système du prix libre est apparu comme le moyen créant l’atmosphère la plus détendue. Nous posons cependant régulièrement la question “qui estime avoir dépensé trop d’argent ce mois-ci ?” lors de nos réunions mensuelles. Et alors, quid des biens à l’intérieur ? On partage tout et on se met tout nu c’est ça ?!

Mutualisation des biens

Non, pas autant. Mais oui, on partage, parce que c’est sympa 🙂 Imaginez déjà l’organisation de l’espace :

Le rez-de-jardin : 1 garage collectif, avec des outils mis en commun, 1 coworking/buanderie/salle de vie, avec pleiiin d’objets en commun et 1 chambre d’intimité, reliée à un dortoir plus haut.

Le rez-de-chaussé : 1 chambre individuelle, 1 chambre d’ami-e-s, 1 grand/salon cuisine et une entrée dans le jardin. Ici, même constat : on a du mal à savoir à qui appartient quoi parfois… 🙂 Chaque coloc a mis en commun ses meubles, ses affaires. Depuis que des personnes sont parties de la maison sans reprendre certaines de leurs affaires, elles sont tombées dans le bien commun.

Schéma de la maison bleue

Un premier étage : 2 chambres d’origine occupées par 2 personnes, 3 chambres construites dont 1 chambre faite sur l’ancienne cuisine (rappelez-vous, nous louons 5 appartements, tous indépendants à l’origine). Ici, il n’y a que la salle de bain que l’on mutualise. Tout ce qui se trouve dans les chambres est privé.

Un second étage composé de 2 appartements : 3 chambres dans l’un, dont 2 construites et 1 mezzanine + un espace de vie commun, où l’on mutualise des rangements, et une douche qui sert à 8 personnes. En face, un autre appartement avec 1 chambre construite et 1 dortoir de 4 personnes. Ici, chacun-e a une place dans la penderie commune, mais l’espace est largement mutualisé…

Ce n’est pas clair ? Tant pis 🙂 Retenez que oui, nous mutualisons beaucoup, voire faisons dons de nos biens à la communauté, mais bien sûr, c’est libre à chacun-e, il n’y a aucune règles à ce sujet. Autre fait non anecdotique : nous récupérons beaucoup d’objets, meubles ou matériaux. Que ce soit de la rue, des amis-es ou des événements, la maison en regorge…!

L’atelier bois en action pour créer et modeler la récup

Bon, on a fait le tour ? À ce stade, vous êtes en train de rêver ou vivre un enfer en nous lisant ! Nous sommes conscient-e-s du caractère extrême de certaines méthodes. Mais croyez-le ou non, certains-nes sont allé-e-s beaucoup plus loin dans le vivre collectif… Ce qu’il faut retenir, c’est les 2 valeurs socles qui nous animent tous : la responsabilité et la confiance.

Responsabilité et Confiance

Vous ne pouvez pas imaginer vivre dans ce lieu sans être responsable. Cela veut dire faire attention à l’autre, finir ce que l’on commence, ne pas laisser une chose ou une autre pourrir, aller de l’avant pour construire, développer… En somme, nous sommes tous pro-actifs-ves, autant que faire se peut et à l’écoute du besoin des autres. Sans cette notion de responsabilité, il n’y a pas de vivre ensemble serein.

Vous ne pouvez pas non plus vivre en communauté sans faire confiance ! Imaginez si nous devions nous méfier des uns-es et des autres… Le coeur de notre vie collective est de faire en sorte que chacun-e se sente bien à la maison et nous sommes toutes et tous responsable de cette atmosphère bienveillante, sereine et joyeuse. Nous nous faisons confiance mutuellement pour garantir ce cadre de vie collective.

Petit repas entre amis 🙂

Voilà, vous savez tout. Nous fonctionnons comme ça aujourd’hui, mais ce n’est pas gravé dans le marbre. Il nous a fallu de l’adaptation, nous avons testé, arrêté, recommencé, ignoré, poussé.. Bref, ce n’est pas un modèle tout fait, il se vit et se construit avec celles et ceux qui le font vivre. Demain, avec de nouvelles personnes, une nouvelle organisation. Et c’est ça qui est le plus merveilleux dans ce lieu !

Pour discuter de tout ça avec nous : contact@la-maison-bleue.org et pour voir plus d’actus ou de photos : facebook.com/lamaisonbleueblr